Le Cameroun participe à la semaine consacrée à la lutte contre la Résistance AntiMicrobienne

Du 16 au 23 novembre 2024, la capitale politique du Cameroun a accueilli les membres du gouvernement, acteurs de la société civile, le monde médical, les institutions académiques, et divers acteurs des filières concernées, qui ont pris part aux différentes activités prévues en l’occasion.

Sous le thème : «  Eduquer, Promouvoir, Agir », Yaoundé a été l’hôte des délégations en provenance d’une dizaine de pays africains, dans un programme hybride, pour la semaine mondiale de sensibilisation à la Résistance aux AntiMicrobiens (RAM). Cette campagne internationale vise à sensibiliser le public aux risques associés à l’utilisation inappropriée des antimicrobiens chez l’homme, chez l’animal et dans les cultures. L’objectif étant d’initier un changement de comportement des consommateurs, afin d’encourager  une utilisation responsable des antimicrobiens pour réduire l’apparition et la propagation de la résistance. Au programme, des rencontres sportives, des conférences –débats, des concours, des marches de sensibilisation, des foires expositions, visite des laboratoires de recherche, et des fermes agropastorales, pour une sensibilisation multi acteurs.

Allocution du Dr. Donbou Bertrand/Médecin vétérinaire, Point focal RAM/MINEPIA

Les agents antimicrobiens sont des substances utilisées pour tuer ou inhiber la croissance des micro-organismes tels que les bactéries, les virus, les champignons et les parasites. Ils jouent un rôle crucial dans la prévention et le traitement des infections. Voici les principales catégories d’agents antimicrobiens : les Antibiotiques dont les Antibactériens, utilisés pour traiter les infections bactériennes ; exemples : pénicilline, amoxicilline, ciprofloxacine. Citons également les Antiviraux : utilisés pour traiter les infections virales. A l’instar de: acyclovir (contre l’herpès), oseltamivir (contre la grippe). Les Antifongiques : utilisés pour traiter les infections fongiques, tels que: fluconazole, itraconazole. Mais également les Antiparasitaires : utilisés pour traiter les infections parasitaires. Exemples : métronidazole (contre les protozoaires), mébendazole (contre les vers intestinaux).

Exposition des travaux de recherche sur la RAM.

Les agents Antimicrobiens sont nécessaires pour traiter efficacement une grande variété d’infections et de sauver des vies. D’ailleurs ils servent en prophylaxie pour prévenir les infections après des interventions chirurgicales ou dans des situations à haut risque. Leur usage permet le de contrôler l’expansion des maladies, des épidémies et des pandémies. Cependant, l’utilisation abusive ou inappropriée de ces agents peut conduire à la résistance aux antimicrobiens, font courir le risque de rendre les traitements moins efficaces.

Dr. Taïga, Ministre des Pêches et des Industries Animales ( MINEPIA).

 Si on considère les causes médicamenteuses, la prescription  exagérée des antibiotiques qui auront tendance à rendre inefficaces les traitements d’infections virales, l’automédication fortement répandue en Afrique, les interruptions de traitements, rendent les bactéries résistantes. Mais plus dangereux encore sont les causes liées à l’’utilisation extensive d’antibiotiques chez les animaux d’élevage pour prévenir les maladies ou stimuler la croissance agricole. Ce sont autant de phénomènes qui contribuent à l’émergence de souches résistantes, transmissibles aux humains. Le danger indicible de la RAM est devenu une cause de mortalité plus importante que le paludisme, le VIH et la tuberculose. En 2019, environ 1,05 million de décès étaient attribués à la RAM en Afrique, un chiffre qui va en augmentant.

Dr  Ali Ahmed Yahaya, Responsable RAM/OMS Afrique

L’occasion était donnée aux acteurs directement touchés de militer pour une plus grande couverture des alertes, contre ce problème de santé publique. Surtout que la RAM est due à plusieurs facteurs interconnectés, il est question de créer une convergence des actions de terrains. Dr  Ali Ahmed Yahaya, Responsable de l’équipe RAM au bureau régional OMS Afrique, basé à Brazzaville au Congo, nous a confié : « l’approche « OneHealth » nous a amené à penser une compétition destinée aux étudiants des filières portant sur la RAM, en provenance de différents pays en Afrique. Leurs résultats vont contribuer aux recherches dans les domaines de la santé humaine, animale, et environnementale. Les finalistes vont véhiculer des messages à travers leurs recherches, et partager les bonnes pratiques dans leurs pays respectifs, afin d’éduquer à la prévention des antimicrobiens ».

Intervention du ROOHCAM

Il est indéniable, de constater que l’ignorance de la dangerosité de la RAM, met les communautés  dans une situation de vulnérabilité extrême. Et ce d’autant plus que c’est une population très souvent exposée à l’automédication, par manque de personnel médical dans les zones les plus reculées. Il faut souligner que ce sont les populations vivant en zone rurale, qui sont surtout appelées à manipuler des intrants agricoles, ou produits d’élevage, sans le contrôle des médecins vétérinaires. Le Réseau des OSC’s One Health du Cameroun (ROOHCAM) a réaffirmé son rôle, en présentant ses initiatives au niveau local, en matière d’intégration des communautés dans la sensibilisation contre la RAM. Mme Marie Hélène Ebieline, présidente du réseau  s’est exprimée : « tout ce qui est fait en matière de santé, c’est pour la communauté ; d’ailleurs les urgences de santé proviennent généralement des alertes recueillies auprès des communautés. C’est la raison pour laquelle nous menons des actions de résilience à la RAM, en plaçant les communautés au centre de nos préoccupations, et partant, de nos actions sur le terrain ».

Visite d’une ferme piscicole en marge de la semaine de sensibilisation à la RAM.

Lorsqu’un antibiotique tue des bactéries sensibles, les bactéries naturellement résistantes survivent et se multiplient, dominant la population bactérienne. L’absence de surveillance et de régulation  de la RAM facilitent les risques de  propagation des urgences sanitaires. Dans certains pays, l’absence de laboratoires diagnostiques performants et de formation adéquate des professionnels de santé limite la capacité à diagnostiquer correctement les infections et à utiliser les antibiotiques de manière appropriée. En outre, des conditions d’hygiène et d’assainissement médiocres dans les hôpitaux et les communautés peuvent favoriser la propagation des bactéries résistantes. La lutte contre la RAM nécessite une approche globale et coordonnée impliquant une meilleure gestion des antimicrobiens, une surveillance accrue, une formation des professionnels de santé, et une sensibilisation du public à l’importance d’un usage responsable des antimicrobiens. Le programme zoonoses a bénéficié de l’appui financier de Breakthrough Action, pour élaborer le profil comportemental et le guide des messages essentiels de sensibilisation spécifiques aux 5 zones agro-écologiques du Cameroun.

Ange ATALA