A l’occasion, l’Alliance française de Garoua a accueilli des conférences animées par des experts sur la question de l’autisme et les difficultés d’apprentissage y relatifs. Parents, enfants et personnel de santé, ainsi que du domaine de l’éducation spécialisée, ont donné de la voix, à travers plusieurs animations ce 2 avril 2025.
« L’autisme et l’apprentissage »: une première à Garoua
Dans son mot de bienvenue, Mme Hyacinthe Porcher, Directrice de l’Alliance Française de Garoua, a souligné la nécessité de cette initiative : « C’est une première pour nous à l’Alliance Française de Garoua d’organiser la Journée mondiale de l’autisme. Nous ne l’avons jamais fait auparavant et je n’avais pas entendu parler d’un tel événement dans la ville. Il est temps de mettre la lumière sur l’autisme« .
La directrice a insisté sur le besoin réel de rassembler enseignants, directeurs d’établissements et parents d’élèves pour faire le point sur la situation des enfants autistes à Garoua : « Comment vivent nos enfants autistes ici au Cameroun et particulièrement ici à Garoua ? Comment sont-ils pris en charge ? »
Sensibilisation par le théâtre
La conférence a débuté par un sketch présenté par le groupe de soutien Albatros, visant à sensibiliser la population sur l’autisme. Le message principal rappelait que l’autisme n’est pas le résultat de sorcellerie ou de pratiques mystiques, mais bien un trouble neuro-développemental dont la prise en charge est assurée par des professionnels comme les orthophonistes.
La politique nationale d’éducation inclusive
M. Tambeck Tayim Patrice, Inspecteur Pédagogique chargé de l’enseignement primaire et point focal pour l’éducation inclusive du Nord, a présenté la politique nationale d’éducation inclusive validée par le gouvernement camerounais en octobre 2024. Ce plan de développement couvrant la période 2024-2028 vise à offrir un accès à une éducation de qualité à au moins 25% des personnes à besoins éducatifs spécifiques.
Selon M. Tayim, le gouvernement camerounais a alloué un budget conséquent de 100 milliards de FCFA pour cette politique, qui s’appuie sur divers textes fondamentaux comme les déclarations universelles des droits de l’homme et les conventions internationales. Dans la région du Nord, on compte déjà 42 écoles inclusives (21 maternelles et 21 primaires), sur un total de 720 écoles inclusives à travers le pays.
Comprendre l’autisme
Un orthophoniste, M. Maoma, a expliqué que l’autisme est un trouble neuro-développemental qui se caractérise par des déconnexions au niveau cérébral durant les dernières semaines précédant la naissance. « Les troubles sont généralement perceptibles dès les 18 mois de l’enfant avec une altération au niveau de la communication et des difficultés au niveau des interactions sociales », a-t-il précisé. Parmi les signes avant-coureurs de l’autisme, il a mentionné :
- Des particularités sensorielles (hypersensibilité et hyposensibilité) ;
- L’intolérance au changement ;
- Des routines inflexibles ;
- Des intérêts restreints ;
- Des mouvements et langages répétitifs ;
- Des difficultés d’interaction sociale.
Il a insisté sur le fait que l’autisme est une « neuro-condition » et que le manque de sommeil peut provoquer des crises comportementales chez les personnes autistes lorsqu’elles accomplissent des tâches complexes.
La prise en charge à Garoua
Mme Nyamedi Admira, orthophoniste, a présenté le travail réalisé au Centre de langage de Garoua, situé au quartier Plateau. Elle a détaillé le processus de consultation qui commence par un entretien avec les parents pour comprendre le contexte familial et les particularités de l’enfant, suivi d’un bilan permettant d’évaluer le degré d’autisme.
Face au constat de marginalisation des enfants autistes dans les écoles ordinaires, le Centre de langage, installé en 2023, a transformé son cabinet d’orthophonie en école spécialisée. « Le but de cette école est de donner des bases pour permettre leur retour dans l’école ordinaire », a expliqué Mme Admira.
L’expérience d’une école inclusive
M. Souaibou Sadjo, Directeur de l’École Primaire Publique d’Application (EPA) de Ngalbidje, a partagé l’expérience de son établissement dans l’accueil d’enfants autistes. Il a noté que souvent, « certains parents veulent se débarrasser de leurs enfants » et que c’est le personnel enseignant qui découvre le handicap ou le trouble.
L’école, récemment devenue inclusive, travaille avec des moyens limités. Les enseignants s’attachent à sensibiliser les parents des enfants neurotypiques sur le caractère inclusif de l’établissement. M. Sadjo a souligné que le système d’évaluation est adapté à chaque enfant, qu’il soit à besoins spécifiques ou non.
Un pas important vers l’inclusion
Cette conférence-débat marque une étape importante dans la sensibilisation à l’autisme à Garoua. Elle a mis en lumière les défis mais aussi les initiatives prometteuses qui émergent pour accompagner les enfants autistes dans leur parcours éducatif.
L’Alliance Française de Garoua, avec cette première édition de la Journée Mondiale de l’Autisme, a créé un espace de dialogue nécessaire entre professionnels, institutions et familles concernées, contribuant ainsi à une meilleure compréhension et prise en charge de l’autisme dans la région.
Josué Zra