Le Sommet Climate Chance 2025, qui se tiendra du 1er au 3 juillet à Bruxelles, réunira les acteurs non-étatiques européens et africains de la lutte contre le changement climatique. Cette rencontre stratégique vise à renforcer la coopération transrégionale et à amplifier le rôle des collectivités territoriales, des entreprises et de la société civile dans la mise en œuvre concrète de l’Accord de Paris.
Bruxelles – L’Association Climate Chance organise du 1er au 3 juillet 2025 à Bruxelles son Sommet mondial des acteurs non-étatiques du climat, avec une édition spéciale consacrée aux relations entre l’Europe et l’Afrique. Cet événement majeur rassemblera des centaines de représentants de collectivités territoriales, d’entreprises, d’organisations de la société civile, de syndicats et d’institutions de recherche des deux continents pour renforcer leur coopération dans la lutte contre le changement climatique et accélérer la transition écologique à l’échelle locale.
Le Sommet Climate Chance s’est imposé depuis sa création comme la principale plateforme internationale dédiée spécifiquement aux acteurs non-étatiques du climat, reconnaissant que si les gouvernements nationaux négocient les accords internationaux et définissent les politiques climatiques nationales, la mise en œuvre concrète des engagements climatiques se réalise largement à l’échelle territoriale et implique une multiplicité d’acteurs au-delà des seuls États. Les villes, les régions, les entreprises, les organisations de la société civile et les citoyens jouent un rôle déterminant dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’adaptation aux impacts climatiques et la construction de sociétés résilientes et bas-carbone.
L’édition 2025, en se focalisant sur le dialogue Europe-Afrique, répond à une double nécessité stratégique. D’une part, l’Europe, qui s’est fixée des objectifs climatiques parmi les plus ambitieux au monde avec sa neutralité carbone visée en 2050 et sa réduction de 55% des émissions d’ici 2030, cherche à renforcer ses partenariats avec l’Afrique pour sécuriser ses approvisionnements en énergies renouvelables, en hydrogène vert et en matières premières critiques pour la transition énergétique. D’autre part, l’Afrique, continent le moins responsable historiquement du changement climatique mais le plus vulnérable à ses impacts, nécessite des transferts massifs de technologies, de compétences et de financements pour s’adapter et développer des trajectoires de croissance bas-carbone.
Les collectivités territoriales occuperont une place centrale dans le sommet. Les villes africaines, qui connaissent une urbanisation exceptionnellement rapide avec un doublement de leur population attendu d’ici 2050, font face à des défis considérables en matière d’infrastructures, de mobilité, de gestion des déchets, d’accès à l’énergie et de résilience face aux événements climatiques extrêmes. Les expériences des villes européennes, qui ont développé des expertises avancées en planification urbaine durable, en transports publics décarbonés, en efficacité énergétique des bâtiments et en économie circulaire, constituent des références précieuses, à condition d’être adaptées aux contextes africains caractérisés par des ressources financières limitées, une informalité économique importante et des dynamiques démographiques spécifiques.
Le sommet offrira des espaces d’échange entre maires et responsables de collectivités des deux continents pour partager leurs stratégies climatiques, leurs innovations et leurs difficultés. Des jumelages climatiques entre villes européennes et africaines pourront être formalisés, établissant des partenariats durables de coopération technique, de transfert d’expertise et éventuellement de soutien financier. Ces coopérations décentralisées, qui s’appuient sur des relations directes entre collectivités sans passer par les canaux diplomatiques traditionnels, se sont révélées particulièrement efficaces pour la mise en œuvre de projets concrets.
La participation du secteur privé constituera également un axe majeur du sommet. Les entreprises européennes, confrontées à des réglementations climatiques de plus en plus contraignantes et à une demande croissante de leurs parties prenantes pour des stratégies de décarbonation crédibles, cherchent des opportunités d’investissement dans les énergies renouvelables, l’économie circulaire et les technologies propres. L’Afrique offre des marchés en forte croissance, des ressources naturelles abondantes et un potentiel exceptionnel en énergies renouvelables, particulièrement solaire et éolien. Le sommet facilitera les rencontres entre investisseurs européens et entrepreneurs africains, la structuration de projets et l’identification de mécanismes de financement appropriés.
Les thématiques sectorielles abordées lors du sommet couvriront l’ensemble des dimensions de la transition climatique. L’énergie occupera une place prépondérante, avec des sessions consacrées au déploiement massif des énergies renouvelables en Afrique, aux mini-réseaux et solutions décentralisées pour l’électrification rurale, à l’hydrogène vert comme vecteur énergétique d’avenir, et aux stratégies de sortie progressive des énergies fossiles. Pour l’Afrique subsaharienne, où près de 600 millions de personnes n’ont toujours pas accès à l’électricité, la transition énergétique représente simultanément un défi d’électrification universelle et une opportunité de construction directe de systèmes énergétiques propres sans passer par la phase carbonée.
La mobilité urbaine, responsable d’une part croissante des émissions dans les villes africaines en expansion, fera l’objet d’ateliers dédiés. Les systèmes de transport en commun rapide (BRT), les mobilités douces, l’électrification des flottes de véhicules et la planification urbaine favorisant la proximité constitueront autant de solutions discutées. Des villes comme Dakar, Abidjan ou Nairobi, qui ont développé des projets de transport public structurants, pourront partager leurs expériences avec des homologues européennes et d’autres villes africaines.
L’agriculture climato-intelligente, enjeu crucial pour un continent où l’agriculture emploie la majorité de la population active et reste largement dépendante de la pluviométrie, sera également au programme. Les techniques d’agroforesterie, de gestion durable des sols, d’irrigation efficiente, de diversification des cultures et d’utilisation de variétés résistantes à la sécheresse offrent des pistes pour renforcer simultanément la productivité agricole, la résilience climatique et la séquestration du carbone. Les coopérations entre centres de recherche agronomique européens et africains, les transferts de technologies et le partage de semences adaptées pourront être facilités par les échanges du sommet.
La gestion de l’eau, ressource de plus en plus sous tension en raison du changement climatique, constituera un autre axe thématique majeur. Les technologies de traitement et de réutilisation des eaux usées, la gestion intégrée des bassins versants, les infrastructures de stockage et les solutions fondées sur la nature pour la gestion de l’eau feront l’objet de sessions techniques. Pour les régions du Sahel, de la Corne de l’Afrique et d’Afrique australe, confrontées à des sécheresses récurrentes et à un stress hydrique croissant, ces solutions revêtent un caractère vital.
L’économie circulaire et la gestion des déchets représentent des enjeux particulièrement aigus pour les villes africaines, où la collecte des déchets demeure largement défaillante et où les décharges informelles prolifèrent. Les technologies et modèles organisationnels de collecte, de tri, de recyclage et de valorisation énergétique des déchets présentés par des acteurs européens expérimentés pourront inspirer des solutions adaptées aux contextes africains. Les filières de recyclage des plastiques, des équipements électroniques et des matériaux de construction offrent également des opportunités de création d’emplois verts pour une jeunesse africaine en forte croissance.
La finance climatique occupera une place transversale dans l’ensemble du sommet. L’enjeu de mobilisation des 100 milliards de dollars annuels promis par les pays développés aux pays en développement, largement manqué jusqu’à présent, et la nécessité d’aller bien au-delà de ce montant pour financer véritablement la transition et l’adaptation en Afrique, seront au cœur des débats. Les mécanismes de financement innovants, combinant ressources publiques et privées, les obligations vertes, les garanties de risque, les fonds d’investissement à impact et les paiements pour services écosystémiques seront explorés comme autant de leviers pour débloquer les investissements massifs nécessaires.
Les défis spécifiques de l’adaptation climatique en Afrique, continent particulièrement vulnérable aux impacts du changement climatique, bénéficieront d’une attention soutenue. Les systèmes d’alerte précoce face aux événements extrêmes, les infrastructures résilientes, l’agriculture adaptée, la protection des zones côtières contre l’élévation du niveau de la mer et l’érosion, ainsi que les mécanismes d’assurance contre les risques climatiques constituent autant de dimensions de l’adaptation qui seront discutées. L’expertise européenne en matière de modélisation climatique, de prévision météorologique et de planification de l’adaptation pourra être mobilisée pour renforcer les capacités africaines.
La dimension de justice climatique traversera l’ensemble des discussions. L’Afrique, responsable de moins de 4% des émissions historiques de gaz à effet de serre mais subissant de manière disproportionnée les impacts du dérèglement climatique, revendique légitimement un soutien financier et technologique massif de la part des pays industrialisés historiquement responsables du problème. Le sommet offrira un espace pour aborder frontalement ces questions d’équité, de responsabilités différenciées et de solidarité internationale, dans un esprit constructif visant à identifier des solutions concrètes plutôt qu’à entretenir des postures de confrontation.
La participation de la société civile, des organisations non gouvernementales, des syndicats et des représentants de communautés locales et de peuples autochtones enrichira les débats en apportant des perspectives souvent absentes des forums dominés par les décideurs politiques et économiques. Ces acteurs jouent un rôle crucial de mobilisation citoyenne, de surveillance de la mise en œuvre des engagements et de défense des droits des populations les plus vulnérables face aux impacts climatiques.
Le contexte géopolitique dans lequel se tient ce sommet mérite d’être souligné. Les relations Europe-Afrique traversent une phase de redéfinition, marquée par une volonté européenne de renforcer ses partenariats avec le continent africain face à l’influence croissante d’autres puissances comme la Chine, la Russie ou la Turquie. Le climat et la transition énergétique constituent des domaines privilégiés pour construire des partenariats mutuellement bénéfiques, l’Europe ayant besoin des ressources et du potentiel énergétique africains tandis que l’Afrique nécessite des technologies, des compétences et des financements européens.
Pour les pays d’Afrique centrale et particulièrement le Cameroun, le Sommet Climate Chance 2025 représente une opportunité stratégique de valoriser leurs atouts spécifiques et d’attirer des partenariats et des investissements. Le Cameroun, doté d’un potentiel hydroélectrique considérable, d’importantes forêts séquestratrices de carbone et d’une biodiversité exceptionnelle, peut y promouvoir ses opportunités d’investissement dans les énergies renouvelables, la gestion durable des forêts, l’agriculture climato-intelligente et l’économie circulaire. La présence d’une délégation camerounaise représentative, incluant des élus locaux, des entrepreneurs, des chercheurs et des représentants de la société civile, permettrait de maximiser les retombées en termes de visibilité internationale, de construction de partenariats et de mobilisation de ressources.
Le Sommet Climate Chance 2025 s’inscrit dans le calendrier climatique international entre deux COP décisives et à un moment où l’urgence d’accélérer drastiquement l’action climatique ne fait plus débat. Les rapports scientifiques successifs du GIEC documentent l’accélération du réchauffement et le rétrécissement de la fenêtre d’opportunité pour maintenir le réchauffement sous les 1,5°C ou même 2°C. Dans ce contexte, la mobilisation des acteurs non-étatiques et leur mise en réseau transrégionale apparaissent plus nécessaires que jamais pour compléter l’action des États et concrétiser sur le terrain les engagements internationaux.
NKITCHA FOMEN
