La Norvège va verser 17 millions de dollars pour récompenser le Gabon pour le carbone séquestré et d’autres mesures de lutte contre la déforestation.
«Après que des experts indépendants ont vérifié les résultats obtenus par le Gabon en matière de réduction de la déforestation et de la dégradation des forêts, un paiement de 17 millions de dollars américains rétribue les réductions réalisées par le Gabon en 2016 et 2017, par rapport aux niveaux d’émission annuels de 2006 à 2015», selon un communiqué du ministère gabonais de l’Environnement. Les forêts gabonaises «absorbent un total de 140 millions de tonnes de CO2 chaque année, ce qui équivaut au retrait de 30 millions de voitures de la circulation dans le monde», écrit le ministère gabonais de l’Environnement. Les fonds sont délivrés par l’Initiative pour la forêt de l’Afrique centrale (CAFI), un organisme lancé en 2015 par l’ONU, qui rassemble des pays d’Afrique centrale et des bailleurs de fonds internationaux. Plus concrètement, les fonds reçus seront notamment consacrés à des investissements dans la foresterie communautaire. «L’objectif est d’améliorer les revenus, les moyens de subsistance et le bien-être des communautés au Gabon», selon le communiqué. «Le pays a démontré qu’avec une vision, un dévouement et un dynamisme fort, des réductions d’émission peuvent être réalisées dans la forêt du bassin du Congo», s’est félicité au nom du CAFI Sveinung Rotevatn, le ministre norvégien de l’Environnement.
En marge du sommet exceptionnel sur le climat, le samedi 21 septembre à New York, la Norvège a signé avec le Gabon à New York un accord inédit qui stipulait que le pays africain couvert de forêts se verrait payer pour ne pas déforester et ainsi réduire les émissions de carbone. Pour la première fois, les efforts d’un pays d’Afrique sont valorisés dans un contrat de dix ans pour la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre due à la déforestation et à la dégradation, et pour l’absorption du dioxyde de carbone par ses forêts naturelles. Le contrat signé entre Norvège et Gabon stipule que la Norvège paiera 10 dollars pour chaque tonne de carbone non émise, par rapport à la moyenne récente des émissions du pays (2005-2014). Si le Gabon poursuit ses efforts, il pourrait percevoir un montant maximal de 150 millions de dollars soit 136 millions d’euros sur dix ans. Mais surtout, ce premier geste marque un tournant et fait naître l’espoir qu’en acceptant de payer 10 dollars la tonne, la Norvège poussera le prix mondial du carbone à la hausse.
Les forêts d’Amazonie, d’Afrique équatoriale ou encore d’Indonésie sont de grands réservoirs de carbone. Les arbres et la végétation absorbent et en stockent des quantités massives. La communauté internationale est focalisée sur des zones très déforestées comme l’Amazonie, mais quid des bons élèves qui n’ont que peu déforesté, comme c’est le cas du Gabon. Depuis plusieurs années, les autorités gabonaises ont développé une politique de conservation relativement poussée pour l’Afrique centrale. Il possède 13 parcs nationaux, qui couvrent 11 % de son territoire, et 20 aires marines protégées. En conséquence, alors qu’il ne possède que 12 % des forêts du bassin du Congo, le Gabon héberge près de 60 % des éléphants de la forêt qui subsistent en Afrique, un indicateur-clé de la bonne gestion des ressources naturelles, selon l’organisme onusien. Au titre de ses nombreux efforts, le pays a dans un premier temps réformé le secteur forestier. Puis il s’est attaqué au sujet hypersensible de l’exportation en prenant l’une des mesures les plus radicales : l’interdiction d’exportation des grumes, ces troncs d’arbres abattus, sans les transformer. Résultat : la production de bois a chuté. Le pays s’est aussi doté de la certification FSC, pour Forest Stewardship Council, le label de gestion durable le plus exigeant dans le domaine forestier qui sera exigible de toutes les concessions d’ici à 2022. Sans compter la mise en place d’un arsenal juridique sévère envers les crimes environnementaux. Grâce à d’importants moyens de surveillance satellitaire développés depuis des années, les crimes de braconnage d’espèces protégées, comme les éléphants, ou de trafic de ressources naturelles sont étroitement renseignés.
Auteur : Joseph Ottou