Comment mieux éduquer au Cameroun à l’ère du digital ? Tel était le thème de la 4e édition de « L’aprem’Soutenable », une activité organisée en partenariat entre l’Institut Français du Cameroun et l’association de droit camerounais Soutenable, le samedi 09 Décembre 2023, à Yaoundé.
Soutenable est une association d’intérêt général qui porte le développement durable dans le débat public en Afrique et anime un réseau d’acteurs engagés en ce sens, le Réseau Soutenable. Dans le but d’atteindre son objet, l’association organise souvent des activités de concertation et d’échanges, L’aprèm Soutenable en est un exemple. L’édition de ce mois de décembre était consacrée à l’ODD 4 – Éducation de qualité, et questionnait les opportunités sous-jacentes à l’ère du digital que nous vivons depuis à peine une décennie au Cameroun. Le panel des intervenants à la table ronde était constitué ainsi qu’il suit :
- Pr Maximilienne Ascension NYEGUE, Vice-Doyenne chargée de la scolarité et du suivi des étudiants à la Faculté des Sciences de l’Université de Yaoundé 1 ;
- Dr. Emmanuel BATAKE, Coordonnateur du réseau des Data journalist/SDG’s Winners
- Christian ETAME, Professeur de Mathématiques et coordonnateur des préfectures des études au Collège Vogt ;
- Jeanne d’Arc BIBOUT, PLEG – Français;
- Chrys MABIALA, modérateur.
Les réseaux de communication pour le transfert des savoirs se sont largement développés grâce à l’expansion d’internet. Considérant le fait que le taux de pénétration d’internet en Afrique connaît une fluctuation quasi permanente, une étude menée en Janvier 2023 par l’agence ECOFIN, montre que l’Afrique centrale a un taux de pénétration d’environ 27,09%. Il est important de noter que la qualité et la couverture d’internet sont des enjeux majeurs pour le continent africain, car le numérique est devenu incontournable pour la réalisation de l’ODD 4. En effet, son objectif vise à : « assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie. »
Dr. BATAKE Emmanuel, Coordonnateur de l’ONG SDG’s Winners, panéliste et par ailleurs data journaliste, a rappelé que le taux de couverture d’internet au Cameroun qui est de 45,6%, le meilleur de la sous-région, devrait être exploité au mieux. En effet, selon Képios, cabinet de conseil en stratégie, les internautes au Cameroun auraient accru de 330 000 (+2,6%) entre 2022 et 2023. Ce qui consacre au pays 3,90 millions d’utilisateurs de médias sociaux en janvier 2023, soit 13,8% de la population totale, une masse non négligeable dont les potentialités sont explorées au rabais.
Triste est de constater que les réseaux sociaux qui détiennent la part belle de ce taux de couverture, ne sont pas les plates-formes consacrées à l’éducation tel que Google Scholars, ou encore du domaine professionnel comme LinkedIn ou Indeed. C’est plutôt TikTok et Facebook qui accordent la part belle aux « bad buzz et toutes autres informations sensationnelles, pour détourner les moins aguerris dans l’utilisation du digital », relevait Pr. Maximilienne NYEGUE, Vice Doyenne à la faculté des sciences de l’Université de Yaoundé 1. En effet, le secteur des télécoms au Cameroun s’aligne encore à la réglementation française qui n’a pourtant pas les mêmes systèmes de valeurs que la culture africaine, en termes d’éducation. Il tarde à régulariser l’accès à certains contenus néfastes, un simple message d’alerte ne suffit pas à stopper les contrevenants qui pourtant sont avertis par un pop-up, sans plus.
Pr. ESOH ELAME
Également présent dans l’assistance, Pr ESOH ELAME, en sa qualité de pédagogue dans plusieurs institutions universitaires à travers le monde, a formulé le vœu de voir se pérenniser le « campus numérique virtuel », déjà établi avec les Universités de Liège en Belgique et de Guangzhou en Chine, dans les Universités au Cameroun. Le but étant de faciliter l’obtention des diplômes virtuels, pour limiter la contrainte du partage du savoir que représente la distance pour les apprenants qui le sollicitent. Malheureusement, les étudiants sont limités en termes d’infrastructures d’accompagnement, sans compter le fait que les formateurs manquent pour dispenser les enseignements aux plus désireux dans cette forme d’apprentissage.
Pr. ENYEGUE et M. ETAME
M. Christian ETAME, Coordonnateur des préfectures des études au collège François Xavier Vogt, qui enregistre les meilleurs résultats scolaires depuis des années au Cameroun a présenté la méthode E-Learning mise en place au sein de l’établissement au sein duquel il est enseignant de Mathématiques. Pour cela, on peut interpeller l’épidémie de Covid-19 qui a donné lieu à la contrainte de la quarantaine, sans toutefois changer le cours du calendrier des examens. Pour que le succès qu’on leur reconnaît soit toujours au rendez-vous, les enseignants ont dû repenser leurs méthodes pédagogiques, par des méthodes qui continuent d’être utiles aujourd’hui, citant entre autres le système d’harmonisation digitalisée.
Mme Jeanne-d ’arc BIBOUT, enseignante de français dans la région de l’Ouest, a soulevé le fait que ce n’est pas toujours évident pour les enseignants vivants dans les régions éloignées, moins pourvus en électricité et système de fourniture d’internet. Il s’en est suivi une session de questions-réponses, entre les étudiants et autres acteurs intéressés par la question animée par Chrys MABIALA, ingénieur logiciel, spécialisé dans la transformation digitale.
Etudiant sortant de l’IAI Cameroun, partageant son expérience de l’usage du digital pour la conception d’un logiciel.
Bien que ce ne soit pas clairement mentionné dans la SND30, Il en est ressorti que le gouvernement fait de son mieux pour améliorer l’atteinte de l’ODD 4, à travers la digitalisation des systèmes d’enseignements au Cameroun. En comparaison des prix observés dans les autres pays africains, citons en premier la baisse drastique des coûts d’accès aux données internet, avec 100f on peut se connecter et faire des recherches. Sans oublier le fait que le kit numérique est obligatoire pour les responsables d’établissements, tenus de fournir (groupe électrogène, ordinateurs, imprimantes, modem…). Pour faire face aux nouveaux défis du numérique, nous pensons à l’IA (Intelligence Artificielle) qui risque de faire de gros dégâts dans le secteur de l’éducation si rien n’est fait. Il existe plusieurs initiatives pour améliorer la couverture et la qualité d’Internet. Par exemple, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a publié un rapport qui cible quatre types d’actions publiques pour soutenir la transformation digitale de l’Afrique que le Cameroun compte implémenter: réduire la fracture digitale, soutenir l’innovation locale, dynamiser les travailleurs indépendants et accélérer l’harmonisation, la mise en œuvre et le suivi des stratégies digitales.
Dr. NTSAMA Jacqueline nous livre ses impressions suite à cette initiative dans le podcast qui suit.
Ange ATALA