Du 5 au 8 novembre 2025, le salon Ecomondo réunira à Rimini, en Italie, les acteurs internationaux de l’économie circulaire et du développement durable autour d’un programme de conférences ambitieux. Pour les pays d’Afrique subsaharienne, cet événement majeur représente une opportunité stratégique de transfert de technologies, de mobilisation de financements et de construction de partenariats pour relever les défis environnementaux spécifiques du continent.
Rimini – Le salon Ecomondo, rendez-vous incontournable de la transition écologique en Europe, tiendra son édition 2025 du 5 au 8 novembre dans la ville italienne de Rimini. Cette manifestation internationale, qui s’est imposée comme l’une des principales plateformes d’échange et d’innovation en matière d’économie circulaire, de gestion des déchets et de développement durable, proposera un programme de conférences particulièrement dense et diversifié, reflétant l’ampleur des défis environnementaux contemporains et la multiplicité des solutions émergentes, avec une attention particulière portée aux enjeux et opportunités pour les pays d’Afrique subsaharienne.
L’édition 2025 se distingue par une approche holistique de la transition écologique, structurant son programme autour de plusieurs axes thématiques interdépendants. La décarbonation de l’économie occupera une place centrale dans les débats, avec des sessions consacrées aux stratégies sectorielles de réduction des émissions de gaz à effet de serre, aux technologies de capture et de stockage du carbone, et aux mécanismes de tarification carbone. Pour les pays d’Afrique subsaharienne, continent contribuant faiblement aux émissions historiques mais particulièrement vulnérable aux impacts climatiques, ces discussions revêtent une importance cruciale. Ils peuvent y explorer les opportunités de développement bas-carbone, évitant ainsi de reproduire les trajectoires polluantes des économies industrialisées, tout en accédant aux financements climatiques internationaux et aux marchés du carbone pour valoriser leurs vastes puits de carbone forestiers.

L’économie circulaire, concept désormais mature qui vise à découpler la croissance économique de la consommation de ressources vierges, constituera un autre pilier majeur du programme. Les conférences aborderont les modèles d’affaires circulaires émergents, l’éco-conception des produits, l’allongement de la durée de vie des biens, les stratégies de réemploi et de réparation, ainsi que les innovations dans le recyclage et la valorisation des matières secondaires. Pour l’Afrique subsaharienne, où les pratiques informelles de réparation et de réutilisation sont déjà profondément ancrées dans les économies locales, l’économie circulaire représente moins une rupture qu’une opportunité de formaliser, moderniser et valoriser des savoir-faire existants. La participation à Ecomondo permettra aux acteurs africains de découvrir des technologies et des modèles d’affaires innovants adaptables à leurs contextes, tout en partageant leurs propres expériences de gestion frugale des ressources.
La gestion des déchets, domaine d’expertise historique d’Ecomondo, fera l’objet d’une attention soutenue avec des sessions techniques sur les technologies avancées de tri, les procédés de valorisation énergétique, le traitement des déchets organiques par méthanisation et compostage, ainsi que la gestion des flux de déchets spécifiques. Cette thématique revêt une acuité particulière pour les villes d’Afrique subsaharienne, confrontées à une urbanisation galopante qui génère des volumes croissants de déchets largement non collectés et non traités, créant des risques sanitaires et environnementaux considérables. Le salon offre une vitrine exceptionnelle de solutions technologiques et organisationnelles éprouvées, des systèmes de collecte décentralisée adaptés aux quartiers informels aux unités de valorisation énergétique dimensionnées pour les villes moyennes, en passant par les modèles de partenariat public-privé ayant fait leurs preuves dans des contextes similaires.
Les défis spécifiques de la gestion des déchets plastiques en Afrique, continent devenu le réceptacle d’une partie des déchets mondiaux tout en produisant localement des quantités croissantes de plastiques faiblement recyclés, seront au cœur de plusieurs sessions. Les technologies de recyclage chimique, les applications blockchain pour la traçabilité des flux de plastiques, et les modèles économiques de collecte incitative impliquant les récupérateurs informels représentent autant d’innovations accessibles aux délégations africaines présentes à Ecomondo. Le Cameroun, qui a récemment interdit les plastiques à usage unique et développe une filière de recyclage, pourrait notamment y trouver des partenaires techniques et financiers pour industrialiser ses capacités de valorisation.
La transition énergétique occupera une place substantielle dans le programme, avec des conférences dédiées aux énergies renouvelables, aux systèmes de stockage d’énergie, aux réseaux intelligents, à l’efficacité énergétique dans les bâtiments et l’industrie, ainsi qu’à l’hydrogène vert et aux carburants de synthèse. Pour l’Afrique subsaharienne, dotée d’un potentiel solaire et éolien exceptionnel mais affichant les taux d’accès à l’électricité les plus faibles au monde, la transition énergétique représente simultanément un défi d’électrification massive et une opportunité de construction directe de systèmes énergétiques décarbonés et décentralisés. Les mini-réseaux solaires, les solutions de cuisson propre, et les modèles de financement innovants de l’accès à l’énergie présentés à Ecomondo offrent des pistes concrètes pour les décideurs et entrepreneurs africains. Le potentiel de production d’hydrogène vert dans des pays comme la Mauritanie ou la Namibie, doté de conditions climatiques optimales, pourrait également faire l’objet d’échanges fructueux avec les industriels européens en quête de sources d’approvisionnement diversifiées.
La gestion durable de l’eau, ressource de plus en plus sous tension dans de nombreuses régions du monde, constitue un enjeu majeur pour l’Afrique subsaharienne, où le stress hydrique s’intensifie sous l’effet combiné du changement climatique, de la croissance démographique et du développement économique. Les technologies de traitement et de réutilisation des eaux usées, la gestion intégrée des ressources en eau, l’adaptation aux sécheresses et aux inondations, ainsi que les solutions fondées sur la nature pour la gestion de l’eau présentées à Ecomondo répondent directement aux besoins du continent. Les systèmes d’irrigation efficient, les technologies low-cost de potabilisation et les approches participatives de gestion communautaire de l’eau offrent des perspectives d’amélioration significative de la sécurité hydrique et alimentaire.
La biodiversité et la restauration des écosystèmes, enjeux pour lesquels l’Afrique subsaharienne détient un capital naturel exceptionnel mais menacé, bénéficieront d’une visibilité accrue. Les conférences exploreront les synergies entre objectifs climatiques et objectifs de biodiversité, les approches de restauration écologique à grande échelle, les solutions fondées sur la nature, ainsi que les mécanismes de financement de la conservation. Pour des pays comme le Cameroun, la République Démocratique du Congo ou le Gabon, détenteurs de portions significatives des forêts du Bassin du Congo, Ecomondo représente une opportunité de valoriser leurs services écosystémiques auprès d’investisseurs et de partenaires techniques européens. Les crédits carbone forestiers, les paiements pour services écosystémiques et les mécanismes REDD+ font l’objet d’innovations constantes qu’il est crucial de maîtriser pour optimiser la valorisation du capital naturel africain.
Les dimensions économiques et financières de la transition écologique revêtent une importance particulière pour l’Afrique subsaharienne, confrontée à des besoins d’investissement massifs dans les infrastructures environnementales alors que l’accès au financement demeure structurellement contraint. Les mécanismes de financement vert, les obligations vertes, les critères ESG dans les décisions d’investissement, ainsi que les modèles de financement mixte combinant ressources publiques et privées présentés à Ecomondo offrent des pistes pour débloquer les capitaux nécessaires. La présence d’institutions financières de développement européennes et de fonds d’investissement à impact au salon crée des opportunités concrètes de structuration de projets et de levées de fonds pour les porteurs de projets africains.
Les politiques publiques et les cadres réglementaires, leviers essentiels pour orienter les comportements des acteurs économiques, constituent un domaine d’apprentissage crucial pour les décideurs africains. Les stratégies européennes en matière d’économie circulaire, de responsabilité élargie des producteurs, de fiscalité écologique et de normes environnementales offrent des sources d’inspiration pour les pays africains en cours d’élaboration de leurs propres cadres réglementaires. La compréhension des réglementations européennes émergentes, telles que le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières ou les obligations de diligence raisonnable en matière de déforestation, s’avère également indispensable pour les exportateurs africains souhaitant maintenir leur accès au marché européen.
La dimension de transfert de technologies, enjeu récurrent dans les négociations climatiques internationales, trouve à Ecomondo une traduction concrète à travers les interactions directes entre détenteurs de technologies européennes et potentiels acquéreurs ou partenaires africains. Les conditions de ce transfert – adaptation des technologies aux contextes locaux, formation des personnels, modalités de financement, propriété intellectuelle – peuvent être discutées pragmatiquement, débouchant potentiellement sur des accords de coopération technique mutuellement bénéfiques.
Le développement des capacités humaines, condition sine qua non d’une transition écologique réussie, constitue une autre dimension essentielle de la participation africaine à Ecomondo. La présence de jeunes professionnels, d’entrepreneurs, de chercheurs et de décideurs africains leur permet d’accéder à des formations, de tisser des réseaux professionnels internationaux et d’acquérir une vision actualisée de l’état de l’art technologique et des meilleures pratiques internationales. Ces compétences individuelles et ces réseaux constituent des actifs stratégiques pour accélérer la transition écologique à leur retour dans leurs pays d’origine.
Les opportunités commerciales ne doivent pas être sous-estimées. L’Afrique subsaharienne offre des marchés en forte croissance pour les technologies et services environnementaux, tandis que ses ressources naturelles, sa main-d’œuvre et certains de ses savoir-faire traditionnels peuvent intéresser des partenaires européens. Les espaces d’exposition et les sessions de mise en relation organisées dans le cadre d’Ecomondo facilitent l’identification de partenaires commerciaux et la structuration de joint-ventures ou de contrats commerciaux.
Toutefois, la participation effective des acteurs africains à Ecomondo se heurte à des obstacles qu’il convient de reconnaître et d’adresser. Les coûts de participation – frais de déplacement, d’hébergement, d’inscription – demeurent prohibitifs pour de nombreux acteurs africains, particulièrement les PME, les organisations de la société civile et les représentants de communautés locales. Les organisateurs d’Ecomondo, en partenariat avec des institutions de coopération internationale, pourraient envisager des programmes de bourses facilitant la participation de délégations africaines diversifiées. La barrière linguistique constitue un autre obstacle, la plupart des sessions se déroulant en anglais ou en italien, excluant de facto les francophones et lusophones d’Afrique. L’organisation de sessions en français et la mise à disposition de services de traduction renforceraient l’inclusivité du salon.
Au-delà de la participation ponctuelle au salon, l’enjeu réside dans la construction de partenariats durables et équitables entre acteurs européens et africains de la transition écologique. Ces partenariats doivent dépasser la logique traditionnelle d’assistance technique Nord-Sud pour reconnaître la valeur des innovations, des expériences et des savoirs africains, notamment en matière de gestion frugale des ressources, d’adaptation aux contraintes et d’innovations sociales. Les modèles de coopération gagnant-gagnant, où l’Europe apporte des technologies et des financements tandis que l’Afrique offre des marchés, des ressources et des laboratoires d’expérimentation de solutions adaptées aux contraintes sévères, apparaissent plus prometteurs que les schémas unilatéraux.
Pour le Cameroun spécifiquement, Ecomondo 2025 représente une opportunité exceptionnelle de positionner le pays comme hub régional de la transition écologique en Afrique centrale. Fort de son capital naturel exceptionnel, de sa biodiversité reconnue mondialement, de ses engagements climatiques ambitieux et de sa position géographique stratégique, le Cameroun pourrait y promouvoir ses opportunités d’investissement dans les énergies renouvelables, la gestion durable des forêts, l’économie circulaire et l’agriculture climato-intelligente. Une délégation camerounaise de haut niveau, incluant des représentants ministériels, des entrepreneurs, des chercheurs et des acteurs de la société civile, pourrait maximiser les retombées en termes de visibilité, de partenariats et de mobilisation de ressources. Ecomondo 2025 s’annonce donc comme bien plus qu’un simple salon professionnel pour l’Afrique subsaharienne : c’est une fenêtre d’opportunité stratégique pour accélérer sa transition écologique, mobiliser les ressources nécessaires, accéder aux technologies et aux savoirs, construire des partenariats internationaux et affirmer son rôle dans la gouvernance environnementale mondiale. Dans un contexte où le continent fait face simultanément aux défis du développement économique, de l’urbanisation rapide, du changement climatique et de la préservation de son capital naturel exceptionnel, les solutions, les technologies et les modèles présentés à Rimini offrent des pistes concrètes pour construire des trajectoires de développement véritablement durables, à condition que les conditions d’accès, de transfert et d’adaptation soient réunies pour transformer ces opportunités en réalisations tangibles sur le terrain
NKITCHA FOMEN
